interview de Bernard Tanguy

, par Ecole élémentaire La Flotte

Nous avons invité Bernard Tanguy le réalisateur du court-métrage « Je pourrais être votre grand-mère ».

Il a répondu à nos questions :

Est-ce une histoire vraie ou inventée ?
C’est une vraie histoire que m’a racontée un ami avocat Joël Catherin qui faisait les cartons écrits.
Il n’était pas publicitaire mais sait user des armes de communication. Comme le « street art ». Peut-être a-t-il été influencé par l’artiste Ben.
Dans le film on entend un collègue qui lui reproche « d’être complètement à la rue ». Or il l’est au sens propre. Mais c’est une réussite contrairement à ce que sous-entend l’expression au sens figuré.
J’ai tourné avec de vrais SDF.

Comment êtes-vous devenu cinéaste ?
J’ai été ingénieur pendant dix ans et puis à l’âge de 40 ans j’ai voulu changer de métier. Je me suis tourné vers le cinéma. J’ai commencé par être producteur. Je n’ai pas fait d’études de cinéma, je suis autodidacte. J’ai observé les tournages des films que je produisais. J’ai lu des livres sur le cinéma et j’ai regardé beaucoup de films.
Je suis heureux de faire ce métier de réalisateur. Même s’il faut travailler plus qu’on ne pense.

Où ce film a-t-il été tourné ?
Il a été tourné dans le quartier de la Madeleine à Paris près des grands magasins. Il y avait un campement de Roumains à l’époque en 2010.
On logeait les SDF à l’hôtel mais ils n’y sont pas restés, je pense qu’ils avaient peur de se ramollir en perdant le contact avec la rue.

Où avez-vous trouvé l’argent pour faire ce film ?
L’argent nous l’avons trouvé par France 3 et des subventions du Centre National de la cinématographie. Mais ce n’était pas suffisant, j’ai beaucoup investi d’argent personnel.

Combien de temps avez-vous mis ?
Il a fallu deux mois de préparation avant le tournage qui, lui, a duré une semaine. Mais l’écriture du scénario a pris 6 mois.
On tournait 30 minutes par jour, et on ne gardait en moyenne que 2 minutes 30 s. On faisait 6 à 7 prises par scène. Il y a des pauses pour déjeuner mais aussi pour installer les décors.
Il faut compter deux ans pour un long métrage.

Faut-il beaucoup de monde pour faire un film ?
Il faut 30 personnes dans l’équipe technique. Il y a beaucoup à faire : installer la veille, gérer les mouvements des passants dans la rue, tenir la caméra, placer les rails etc. Il y avait 10 comédiens.

Avez-vous fait beaucoup de films ?
Celui-là était mon 3ème court métrage. J’en ai fait 4 en tout. Actuellement, je fais un long métrage. Il s’appellera « Parenthèse » ou « Interlude ». C’est sur le sentiment de vieillir. 3 amis de 50 ans sont sur un voilier avec des filles de 20 ans.

Est-ce que tout s’est bien passé pendant le tournage ?
Les difficultés rencontrées ont été : trouver l’argent, les ennuis avec les SDF et les problèmes techniques comme la caméra en panne. Nous avons tourné avec de la pellicule.
L’inimitié des autres SDF était imprévue. Jalousie envers ceux qui tournaient. Ils étaient rejetés par la communauté. Les autres venaient perturber le tournage, en insultant les figurants (vendus, pourris…). La prise de son en direct était impossible. Il y a eu des bagarres avec des couteaux. Heureusement pas de blessés. Nous avons dû faire appel à la police. Mais nous avions peur que les sans-papiers en situation irrégulières (un visa n’a que 3 mois de validité) se fassent expulser. A l’époque il y avait des rafles qui les expédiaient en Roumanie. Nos Roumains étaient planqués dans un café. Pour l’un d’eux qui était sorti du café, nous avions dit qu’il était comédien !

Est-ce que votre fils Martin a participé au film ?
Martin joue dans le film : il donne une pièce à un mendiant.

On voit une comédienne célèbre. Combien a-t-elle été payée ?
Frédérique Bel a joué gratuitement.

Rendez-vous hommage à quelqu’un par ce film ?
Ce film rend hommage à la grand-mère roumaine : c’est un être humain, ce n’est pas juste un élément du décor. Il est aussi dédié à mon ami avocat.

Est-ce que vous êtes content de votre film ?
Finalement je suis assez content de ce film. Cela faisait longtemps que je ne l’avais pas vu. Il est toujours d’actualité. Même si je vois des choses à améliorer. Le film est comme une fable. Mais aujourd’hui je ne ferai pas les SDF aussi gentils.